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Minifée


2023-03-10


La Naissance du Refuge


Il y a quelques jours, moi Minifée, j’ai vécu mon deuxième week-end intensif de « Retrouver l’Enfant en Soi », une retraite pendant laquelle nous reprenons contact avec notre enfant intérieur blessé. Pour ma part, j’en identifiais déjà plus d’une, d’âges différents, chacune personnifiant une blessure, un arrêt d’évolution, survenue à cet âge bien précis. Chaque fois que j’accueille une nouvelle enfant intérieure blessée, j’ai le privilège de devenir une adulte plus épanouie. Depuis quelques jours, je prends conscience qu’une de ces enfants intérieures est plus âgée que les autres ; elle a dix-neuf ans. Ses blessures se répercutent encore fortement sur ma vie de femme adulte supposément mature. Ce n’est qu’au cours de ce week-end intensif que j’ai pu le discerner. Je pressens toutefois que je n’ai perçu qu’une infime partie de sa souffrance et de son impact dans ma vie d’adulte.


Devant récupérer ma montre, oubliée à l’ancien édifice ecclésiastique où s’est déroulé cette retraite, je me lance aujourd’hui dans un merveilleux voyage en automobile — sorte de pèlerinage — pour revenir sur ce lieu de découverte. Quelle belle occasion de dialoguer avec chacune de mes enfants intérieures! C’est avec plaisir que vous partage ici ces dialogues qui ont lieu alors que je suis au volant de ma voiture en compagnie de toute ma marmaille intérieure.


Je m’assure que chacune d’elles a son temps de parole. D’abord les deux plus jeunes, Nouvelle-Née et Petite Pouponne, qui gazouillent toutes deux de joie, tandis que Toute Petite Minifée, âgée de trois ou quatre ans, affirme toute rayonnante: « Moi, j’aime ça être avec toi! »


De son côté, mon enfant intérieure de sept ans m’observe longuement, puis un peu déçue, elle me demande de mieux prendre soin de ma coiffure. Puis, elle ajoute : « Je suis trop grande, trop costaude et physiquement trop forte. En plus, je déteste que mon père m’oblige à avoir les cheveux si courts. Je suis contente de voir que les tiens sont longs; moi, je me trouve très laide ». Je lui assure qu’elle est ravissante, et qu’il est toutefois normal qu’elle souffre de se sentir différente des autres enfants de son âge. Ce n’est que beaucoup plus tard, en regardant ses photos avec moi, qu’elle parviendra à se trouver un peu plus jolie.


Puis c’est au tour de ma préadolescente de onze ans de me confier que, bien qu’elle soit une grande fille, elle souhaite que, pour aujourd’hui seulement, je la traite comme une toute petite fille en la berçant dans mes bras. De plus, elle m’autorise à lui faire ressentir un câlin à travers les longs et réconfortants bras de mon conjoint. Elle semble satisfaite de mon accueil puisqu’elle accepte qu’elle et moi chantions, à tue-tête, des chansons des Beatles, accompagnées, bien sûr, de toutes les autres Petites Minifée.


Je profite de cette occasion pour féliciter ma Belle Ado de quinze ans pour son audace et son dynamisme. C’est elle — c’est-à-dire moi quand j’avais son âge — qui a réussi à s’extirper de sa maison familiale toxique, et à partir, non sans grand plaisir, à la découverte du monde. Cette petite est dotée d’une hardiesse et d’une capacité à prendre sa vie en main qui m’a beaucoup fait défaut par la suite. Elle m’annonce tout bonnement : « Je suis aussi une Grande, tout comme toi qui a cinquante-six ans; je vais donc pouvoir t’aider à soigner et à protéger toutes les autres, y compris celle qui est plus âgée que moi, tu sais, celle qui a dix-neuf ans? Elle en a tellement besoin! » Moi, Minifée, je préfère qu’elle demeure dans sa vie d’adolescente, toutefois j’accepte qu’elle m’inspire et m’assiste parfois; ainsi, je l’invite à tirer la sonnette d’alarme lorsque l’une de nous est en danger. Comment y arriver? En amplifiant cette voix intérieure que j’ai trop souvent ignorée.


Avant d’écouter celle de dix-neuf ans, j’entends mon Moi du futur, celle de soixante-dix-huit ans, très touchée, qui me remercie d’avoir entrepris ces démarches qui lui étaient si essentielles. C’est profondément émouvant pour nous deux.


Ma Grande Minifée de dix-neuf ans, victime de violence conjugale, continue d’être, aujourd’hui encore, battue et blessée dans son corps et son âme. Il me faut la traiter avec douceur, car elle souffre dans toute sa personne. Elle ne souhaite pas être prise dans mes bras : non seulement cela lui fait physiquement très mal, mais surtout, elle se sent étouffer. Elle est d’accord pour que nous toutes, lui construisions « un nid » dans lequel nous pourrons nous retrouver, elle et moi, et où elle se sentira VRAIMENT en sécurité. Je lui demande alors à quoi devrait ressembler cet endroit? Et elle, de me décrire doucement, mais avec assurance : « Ce sera une cabane dans la forêt. J’aimerais qu’elle soit suffisamment vitrée, pour que je puisse observer dans toutes les directions lorsque je serai à l’intérieur. Cependant, pour ceux qui passeront à proximité, elle sera invisible. Je pourrai y inviter qui je veux, mais par la suite, ces personnes ne retrouveront jamais le chemin pour y revenir sans mon invitation. Elle sera située entre un lac paisible et une rivière chantante, dans un lieu où il y a quatre saisons. Dans cette forêt, il y aura toutes sortes d’animaux, mais pas d’ours, de moustiques, de mouches noires, ni de ces affreuses guêpes aux longues pattes se balançant sous leur abdomen. » Puis, elle enchaîne, un brin moins tristement : « Je pourrai y écouter de la musique ou en jouer, peindre, dessiner et écrire. Ses meubles seront faits de bois et de matériaux naturels. Regarde là-bas, mon Ti-Loup arpente déjà la forêt, à la recherche du meilleur endroit où l’ériger! »


Moi, Minifée, je commence à prendre conscience de la nécessité de créer un sanctuaire afin de poursuivre la quête qui me fera retrouver toutes les facettes de mon identité. Chacune de mes Enfants Intérieures devra y avoir accès au gré de ses besoins. Wow, j’entends au loin ma belle adolescente de quinze ans, elle a déjà commencé à composer une chanson à propos du refuge! Il semble qu’elle perçoive déjà mieux que moi la richesse de ce qui est en train de se créer ici.


À quoi ressemblera cet abri? Sera-t-il une chanson? Sera-t-il un dessin, sinon une maquette? Moi, Minifée, je suis vraiment impatiente de le découvrir. Toutefois, une chose est sûre, un refuge verra le jour!

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Le présent texte n’a été corrigé que légèrement afin de conserver l’originalité et la spontanéité ressenties par l’auteure au moment de la rédaction, surtout lorsque la dictée provient du cœur. Les noms et prénoms utilisés ici sont fictifs; toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existés serait purement fortuite.